La prise de conscience des enjeux de la lutte contre l’artificialisation des sols n’est pas récente. Les lois de décentralisation ont introduit l’objectif de gérer le sol de façon économe. Les lois SRU de 2000, Grenelle I et II de 2009 et 2010, ALUR de 2014 et ELAN de 2018 ont inscrit la lutte contre l’étalement urbain comme des objectifs généraux des politiques publiques et documents d’urbanisme. En 2021, la loi climat et résilience fixe un objectif d’absence d’artificialisation nette d’ici 2050, précédé d’un objectif intermédiaire de réduction du rythme de la consommation d’espace naturels, agricoles et forestiers (NAF) pour les 10 prochaines années.

En 2016, les surfaces artificialisées des Pays de la Loire représentaient 11,6 % de la surface régionale (source : OCSGE). Depuis 25 ans, les Pays de la Loire se classent en quatrième position des régions les plus artificialisées en raison notamment de leur géographie favorable et de leur dynamisme démographique. Entre 2011 et 2020, les surfaces consommées pour l’urbanisation représentent plus de 20 000 hectares cadastrés. Par ailleurs, dans de nombreux territoires, en particulier dans les villes moyennes et les petites communes rurales, la croissance des surfaces consommées NAF est supérieure à celle de la population.

Cette publication permet d’éclairer les acteurs publics et privés, les décideurs et les citoyens sur ces phénomènes qui concernent tous les territoires des Pays de la Loire mais de manière contrastée.


1 - Le territoire régional est plus artificialisé que la moyenne nationale

En 2020, selon Teruti-Lucas, source permettant des comparaisons régionales et longitudinales, 11,1 % de sols sont artificialisés contre 6,7 % en 1990, 8,3 % en 2000 et 10,2 % en 2010. L’augmentation des surfaces artificialisées s’observe dans toutes les régions. Depuis 25 ans, les Pays de la Loire se placent en quatrième position des régions les plus artificialisées après l’Île-de-France, la Bretagne et les Hauts-de-France. Cette situation s’explique par le dynamisme de la région des Pays de la Loire, une géographie favorable peu accidentée et peu boisée, une bonne desserte en axes routiers, l’attractivité du littoral, l’attachement à la construction individuelle au détriment de formes urbaines moins consommatrices de foncier ainsi qu’un faible coût du foncier. Caractérisé par un habitat dispersé, le territoire régional est plus artificialisé que la moyenne métropolitaine : 9,1 % en France métropolitaine, voire 8,8 % en France de province en ne tenant pas compte des spécificités de l’Île-de-France.

La Loire-Atlantique est le département le plus artificialisé de la région

La Loire-Atlantique est le département le plus artificialisé de la région (14,1 %, contre 7,8 % pour la Mayenne). Les trois autres départements sont artificialisés dans des proportions proches de la moyenne régionale (11,1 %) : 10,0 % pour la Sarthe, 10,7 % pour le Maine-et-Loire et 11,8 % pour la Vendée.


Plus du quart des surfaces artificialisées correspond à des routes

Les routes représentent une part importante de ces surfaces artificialisées. En 2020, 28 % des espaces artificialisés régionaux correspondent à des voiries (source : Teruti-Lucas). Ces voiries occupent 3,1 % de la surface ligérienne et oscillent entre 2,4 % de la surface de la Mayenne jusqu’à 4,1 % de la surface de la Loire-Atlantique. La voirie représente une part d’importance différente des surfaces artificialisées selon les départements. En Mayenne, département le moins artificialisé de la région et le plus petit en superficie (16 % des surfaces régionales), 31 % des espaces artificialisés sont de la voirie, contre seulement 25 % en Sarthe, département recouvrant 19 % des surfaces ligériennes. L’habitat plus dispersé en Mayenne explique un développement d’axes routiers plus importants. Les trois autres départements régionaux occupent entre 21 et 22 % du territoire et les voiries représentent entre 27 et 29 % des sols artificialisés.


L’artificialisation grignote en priorité les espaces agricoles

En 2016, plus de 376 000 hectares étaient artificialisés en Pays de la Loire, soit 11.6 % de la surface régionale selon l’OCSGE, source plus fine que Teruti-Lucas mais actuellement indisponible à l’échelle nationale (méthodes et définitions détaillées en fin de publication).

Les écarts selon la taille des collectivités (cf. quatre classes établies selon la population présente) sont plus importants encore. Ainsi, les dix plus grandes communes de la région (plus de 40 000 habitants) sont les plus artificialisées (53,7 %), à l’opposé des communes de petite taille (moins de 2 000 habitants), souvent plus éloignées des grands centres urbains (7,6 %). Les communes entre 2 000 et 10 000 habitants sont un peu plus artificialisées (12,8 %). Enfin, les communes de taille intermédiaire (entre 10 000 et 40 000 habitants), souvent pôles intermédiaires ou villes situées dans la proche banlieue des grands centres urbains, sont artificialisées à hauteur de 17,4 %. La part des espaces naturels avoisine les 15 %, quelle que soit la taille des communes. Ce sont les espaces agricoles qui en priorité se réduisent, lorsque l’artificialisation est importante.

Les pôles urbains et la bande littorale sont les territoires les plus artificialisés

Peu d’écarts sont observés entre les petites communes de moins de 2 000 habitants des départements, lorsqu’elles sont peu artificialisées. Néanmoins, leur vocation agricole est plus ou moins affirmée (entre 69 % et 84 %), selon la place occupée par les espaces naturels (entre 10 % et 22 %). Dans les petites communes de Vendée et de Mayenne, la fonction agricole est plus affirmée au détriment des espaces naturels qui occupent près de 10 % des sols. Dans le Maine-et-Loire et en Sarthe, 70 % des sols des communes de moins de 2 000 habitants sont à usage agricole, alors que les espaces naturels occupent respectivement 23 % et 20 % du territoire, parmi lesquels les forêts sarthoises et les étangs, les marais, les tourbières ou encore les vallées alluvières du Maine-et-Loire. Artificialisée à 89 %, la commune de Mallièvre dans le nord-est de la Vendée fait exception. Elle accueille 243 habitants en 2019 et figure parmi les plus petites communes de France (seulement 22 hectares). Ses contours communaux correspondent donc quasi exclusivement à ceux du centre historique et de quelques pavillons.

Les villes de plus de 40 000 habitants ne réservent pas la même place aux espaces non artificialisés, qu’ils soient agricoles ou naturels. Or, ce sujet devient déterminant dans un contexte de dérèglement climatique, en posant la question de la place de la nature en ville et de l’implantation d’îlots de fraîcheur pour compenser la précarité énergétique estivale. La ville du Mans par exemple est artificialisée à hauteur de 83 % : seuls 17 % des surfaces sont encore naturels. Ce taux est très élevé, proche de celui de Nantes (81 %), dont la proche périphérie est également très artificialisée : Rezé à 77 %, Saint-Sébastien-sur-Loire à 71 %, Saint-Herblain à 63 % et Sainte-Luce-sur-Loire à 62 %. La préfecture du Maine-et-Loire, Angers, est artificialisée à 72 %. À l’opposé, seuls 32 % des surfaces de la commune de La Roche-sur-Yon sont artificialisés. À Laval, artificialisée à 57 %, ou Saint-Nazaire à 54 %, les surfaces agricoles occupent encore un peu plus de 30 % de l’espace.

Répartition de l'occupation du sol

Par département et selon la population en juin 2016

Source : OCSGE 2016

Plusieurs communes littorales sont également très artificialisées : le Pouliguen à 84 %, Le Croisic à 74 %, la Bernerie-en-Retz à 63 %, Batz-sur-mer à 62 %.

À l’inverse, les 32 communes les moins artificialisées, moins de 4 % de leur surface, se trouvent, pour les trois quarts d’entre elles, dans deux départements non littoraux, la Sarthe et la Mayenne.


2 - Le territoire régional continue de consommer de l’espace plus vite qu’ailleurs

L’ouest de la France est très consommateur d’espaces.


La consommation d’espace reste soutenue dans les Pays de la Loire

De 2011 à 2020, 235 871 hectares ont été consommés en France métropolitaine. Le littoral a participé activement à l’utilisation d’espaces naturels, agricoles et forestiers au cours de la décennie passée à des fins résidentielles et/ou économiques.


Les Pays de la Loire ont largement contribué à cette consommation nationale d’espaces cadastrés, puisqu’ils sont la quatrième région à avoir le plus consommé d’espaces depuis 2011, juste après la Nouvelle-Aquitaine, l’Auvergne-Rhône-Alpes et l’Occitanie, dont les superficies sont pourtant bien plus grandes.

20 000 hectares de surfaces naturelles, agricoles et forestières cadastrées ont ainsi disparu en seulement dix ans. C’est à cette consommation réelle observée entre 2011 et 2020 qu’un objectif de la loi Climat et résilience se réfère, pour réduire de moitié le rythme de la consommation d’espaces au cours des dix années postérieures à la loi, de 2020 à 2011.

La région des Pays de la Loire, alors qu’elle représente 5,9 % de la surface nationale métropolitaine cadastrée de 2021, a contribué à la consommation de surfaces naturelles et agricoles à hauteur de 8,5 % au cours des 10 dernières années de 2011 à 2020. La Bretagne, autre région attractive concernée par l’habitat dispersé, a également consommé beaucoup de nouvelles surfaces (7,6 % soit 17 900 hectares) en comparaison de la surface cadastrée métropolitaine qu’elle occupe (5 % de la surface nationale). Ce phénomène s’observe également en Normandie mais dans une moindre mesure : cette région concentre 7,6 % de l’espace consommé, alors qu’elle ne couvre que 5,5 % du territoire.

À l’inverse, d’autres régions consomment peu, comparé à leur part dans la surface nationale : Centre-Val-de-Loire, par exemple, capte 5,9 % des nouvelles surfaces consommées, alors qu’elle occupe 7,2 % de la surface métropolitaine cadastrée, Bourgogne-France-Comté 4,9 % contre 8,7 % et Grand Est 6,8 % contre 10,5 %.

Enfin, d’autres régions de France métropolitaine, consomment en proportion de leur surface : Nouvelle-Aquitaine représente 16,2 % de la consommation nouvelle, alors qu’elle couvre 15,5 % de la surface métropolitaine cadastrée, Auvergne-Rhône-Alpes 12,8 % pour 12,9 % de la surface métropolitaine et Provence-Alpes-Côtes-d’Azur 5,9 % pour 5,8 % de la surface nationale.

Dans la réalité, la consommation d’espace est plus élevée, puisque les chiffres, issus des taxes foncières, n’incluent par les voiries nouvelles non cadastrées, dont les surfaces représentent une part importante de l’artificialisation des territoires ruraux.

Les deux départements littoraux captent la majorité de cette artificialisation nouvelle


Sur les 20 000 nouveaux hectares cadastrés consommés de 2011 à 2020, près de la moitié (51,1 %) se situent dans les deux seuls départements littoraux (4 893 hectares supplémentaires en Vendée et 5 327 hectares en Loire-Atlantique), ces départements recouvrant seulement 42,5 % des surfaces cadastrées de la région. Le Maine-et-Loire qui occupe 22,1 % de la surface régionale cadastrée a utilisé 17,9 % des surfaces naturelles et agricoles ligériennes soit 3 572 hectares. Dans les deux autres départements, la part des surfaces consommées régionales est également moins élevée que la part des surfaces cadastrées régionales couvertes par ces territoires. Cependant, la consommation des surfaces cadastrées reste forte : 2 822 hectares en Mayenne et 3 391 hectares dans la Sarthe.


Une consommation dont le rythme a ralenti, même si elle demeure élevée

Les Pays de la Loire ont consommé 8 110 hectares cadastrés de 2016 à 2020, soit 3 786 hectares de moins que sur la période précédente 2011 à 2015. Ce ralentissement récent, dans le contexte particulier de la crise sanitaire, s’analyse cependant avec prudence, dans l’attente de prochains millésimes. Par comparaison, à l’échelle nationale, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) signale, sur le portail national de la consommation d’espace, « qu’après une augmentation observée entre 2015 et 2016, le rythme de consommation d’espaces connaît une stagnation ces dernières années. La dernière année d’observation, 2020, révèle cependant une légère hausse de ce rythme, qui est à interpréter avec prudence. » En Pays de la Loire, la baisse semble en revanche se confirmer, grâce à une réduction du volume des nouvelles surfaces d’activités et malgré une augmentation des surfaces destinées à l’habitat.

Dans la région, la Mayenne a réduit de plus d’un tiers sa consommation d’hectares cadastrés de 2016 à 2020 (1 081 hectares sur 2016/20, contre 1 741 hectares sur 2011/15) et le Maine-et-Loire de moitié (1 195 contre 2 377 hectares). Les trois autres départements ligériens n’ont pas connu de fléchissement notable de la consommation d’espace sur la deuxième période de la décennie 2011/2020 même si cette dernière diminue. En effet, il est difficile, à partir de quelques années de déterminer une trajectoire future surtout quand la fin de la période d’observation a été bouleversée par la pandémie de Covid-19.

De petites communes voient leur consommation d’espaces augmenter plus vite qu’ailleurs

Entre 2016 et 2020, les plus petites communes de la région sont celles dont la surface cadastrée consommée augmente le plus. Les communes de moins de 2 000 habitants ainsi que celles entre 2 000 et 10 000 habitants connaissent une augmentation respective de 2,5 % et 2,7 % en seulement 5 ans. En effet, le changement d’usage d’une parcelle cadastrée aura un impact plus fort sur les communes dont la surface cadastrée est faible, c’est le cas par exemple lors de la création d’un lotissement ou d’une zone d’activité. À l’opposé, les surfaces cadastrées consommées par les communes de plus de 40 000 habitants n’ont augmenté que d’1,2 %.


Les espaces sont consommés à des fins avant tout résidentielles

En matière de consommation d’espaces à des fins économiques, plus de 5 186 hectares de surfaces naturelles, agricoles et forestières (NAF) cadastrées ont été affectés en 10 ans à la satisfaction des besoins économiques. Ces hectares représentent 26 % de l’ensemble des surfaces NAF cadastrées consommées. La Vendée est le département qui consomme le plus à des fins économiques soit un peu plus de 1 600 hectares. Le département vendéen concentre 31 % des nouvelles surfaces économiques consommées régionales et 33 % des nouvelles surfaces que le département consomme sont liées à des infrastructures économiques.

8 % des communes ligériennes destinent la moitié ou plus des nouvelles surfaces consommées à l’activité économique. Il s’agit essentiellement de villes faisant partie d’importants bassins d’emplois ou ayant accueilli sur la décennie de référence une infrastructure économique d’ampleur au regard de sa superficie. En périphérie de Nantes, le marche d’intérêt national (MIN) délocalisé à Rezé en 2019, par exemple, diminue mécaniquement la part attribuée à une fonction purement résidentielle : entre 2011 et 2020 seulement 21 % des nouvelles surfaces consommées concernent l’habitat. De même, Carquefou, affecte 40 % de ses surfaces à l’habitat, Saint-Nazaire 32 %, Mamers 26 %, Angers 36 %, Fontenay-le-Comte 31 %. Parmi les villes importantes, Nantes, Laval, La Roche-sur-Yon font exception, en affectant à des fonctions strictement résidentielles encore 48 %, 59 % et 46 % des nouveaux sols consommés.

La consommation d’espaces à des fins résidentielles est dominante. En Pays-de-la-Loire, elle représente 69 % de la consommation totale de la période 2011/2020. Cette part semble stable dans le temps, malgré la réduction au cours de la décennie passée de la taille moyenne des lots destinées à la forme urbaine dominante qu’est la maison individuelle non mitoyenne. En Pays de la Loire, au cours de l’année 2020, la consommation des surfaces destinées à l’habitat a légèrement augmenté, en grande partie portée par la demande en Loire-Atlantique. Dans près de la moitié des communes des Pays de la Loire, la consommation d’espaces dédiée à l’habitat est supérieure à 83 %.

La consommation d’espaces à des fins à la fois résidentielles et économiques (dites mixtes) est quasi inexistante dans la région : les surfaces mixtes ne représentent que 1 % des surfaces NAF consommées, soit 290 hectares en une décennie (2011/2020). Or le choix de combiner les deux finalités, résidentielles et économiques, dans les projets d’aménagement, rapproche les services des logements et limite les déplacements motorisés. Le taux métropolitain est de 2 %.

Dans les Pays de la Loire, la poursuite de la consommation d’espace ne se fait pas uniformément

La carte de l’évolution en volume des surfaces artificialisées entre 2011 et 2020 met en évidence des poches, où les surfaces artificialisées augmentent peu. Le sud-est vendéen, le Saumurois, l’est et le nord sarthois connaissent ainsi des évolutions modérées.

En évolution cette fois, davantage de territoires connaissent des augmentations relatives modérées, notamment dans le Choletais, le canton de Noyant et le pays de Craon en Mayenne. À l’inverse, une pression forte, diffuse et quasi-uniforme s’exerce sur la façade littorale. Entre 2016 et 2020, le taux d’évolution des surfaces consommées par la communauté de communes Vendée Grand Littoral s’élèvent à 4,1 %, celles de CC Challans-Gois Communauté à 2,7 %, communauté d’agglomération de la Région Nazairienne et de l’Estuaire (Carene) à 1,7 %, la communauté de communes de l’Île de Noirmoutier à 2 % ou la communauté de communes Océan Marais de Monts à 2,8 %.

3 - Entre 2016 et 2021, la consommation d’espace croît moins vite que la population

La croissance de la population ligérienne entre 2014 et 2019 est supérieure à la consommation des surfaces naturelles, agricoles et forestières entre 2016 et 2021. La région a accueilli un peu plus de 115 600 nouveaux habitants, alors que 6 400 hectares de surfaces cadastrées étaient consommés entre 2016 et 2020. Ainsi, la population des Pays de la Loire a crû de 3,1 %, contre 2,3 % pour les surfaces artificialisées cadastrées (hors routes).

De grandes disparités s’observent selon les départements

En Loire-Atlantique, la croissance de la population est la plus élevée (6,0 %) et est supérieure de quatre points à celle des surfaces consommées. Dans le Maine-et-Loire et en Vendée, les taux d’évolution sont proches (respectivement + 1,7 % et + 3,5 % pour la population et +  1,5 % + 2,9 % pour les surfaces cadastrées consommées). Dans les deux autres départements, la consommation d’espaces cadastrés croît plus rapidement que la population. En Sarthe et en Mayenne, l’écart entre les deux taux oscille autour de 3 points. Ces deux départements, alors qu’ils perdent de la population, continuent de consommer de l’espace.

En périphérie des grandes villes, les populations et les surfaces consommées de ces territoires enregistrent des taux de croissance assez proches. Sur la bande littorale, même si les surfaces artificialisées sont élevés, elles progressent moins vite que la population. Quelques territoires littoraux sont dans une situation différente, ils consomment de l’espace alors qu’ils ont perdu de la population. C’est le cas de Batz-sur-Mer en Loire-Atlantique et de l’Île de Noirmoutier en Vendée. Néanmoins, il faut relativiser ces résultats car les territoires du littoral artificialisent pour une population temporaire, non comptabilisée dans les chiffres du recensement.

Un changement s’est opéré dans la seconde moitié de la décennie

L’observation sur une période précédente 2009/14 aboutissait à une conclusion différente puisque la croissance de la population ligérienne entre 2009 et 2014 était inférieure à la croissance des surfaces artificialisées. En cinq ans, la population des Pays de la Loire avait crû de 4,3 %, contre 4,9 % pour les surfaces artificialisées hors routes. Il semble donc qu’un changement se soit opéré au milieu de la décennie.

L’observation sur une période plus longue 2016/2025 permettra d’affiner l’analyse et de lisser les décalages entre la période d‘artificialisation, toujours antérieure à l’arrivée d’une population nouvelle.


Les villes moyennes et les petites communes des départements non littoraux continuent à consommer de l’espace alors que leur population augmente peu ou décroît

La forte progression de l’étalement urbain dans les communes de moins de 40 000 habitants devient préoccupante dans les deux départements non littoraux, la Mayenne et la Sarthe. En seulement cinq ans, on y enregistre des écarts entre les deux taux d’évolution allant de 2,8 à 4 points.

Tous les grands pôles urbains ne sont toutefois pas épargnés par l’étalement urbain. De grandes disparités existent entre les principales agglomérations de la région. Alors que Nantes, Angers, Saint-Nazaire et La Roche-sur-Yon enregistrent des taux de croissance de leur population supérieurs à ceux des surfaces cadastrées consommées, les populations du Mans et de Cholet sont quasiment stables et leurs surfaces artificialisées ont légèrement crû, respectivement de 0,6 et 1,4 %. Laval a pour sa part consommé une vingtaine d’hectares. Sa situation est particulière puisque cette ville perd de la population (d’où un taux de croissance négatif de -0,7 %), tout en augmentant ses surfaces artificialisées cadastrées (+ 1,5 %).

4 - En Loire-Atlantique, un nouvel habitant consommera trois fois moins d’espaces que la population en place

La surface moyenne cadastrée et consommée pour un nouvel habitant arrivé entre 2014 et 2019 en Pays de la Loire est inférieure à celle d’un habitant présent en 2014. En effet, un nouvel habitant ligérien a consommé 556 m² cadastrés sur la période 2016/2021 soit 187 m² de moins que la surface consommée par un habitant déjà présent en 2014 (743 m² cadastrés).

Les écarts entre les départements témoignent de situations différentes, expliqués pour partie par le dynamisme démographique. Ainsi, en Loire-Atlantique, l’arrivée d’un nouvel habitant durant la période 2014/2019 s’est accompagnée d’une consommation d’espace (210 m² de surfaces cadastrées en moyenne) moins élevée que la moyenne historique (604 m² en 2014). Concrètement, l’habitat devient plus dense : les maisons s’implantent sur de plus petites parcelles ; certains fonds de parcelles accueillent de nouveaux logements, l’habitat collectif s’installe dans des zones sous tension… La densification prend le pas sur l’étalement urbain. À l’inverse, en Mayenne et en Sarthe où la population décroît, l’artificialisation se poursuit à un rythme élevé. Ces départements connaissent donc un étalement urbain très fort.

Plus une commune est peuplée et moins la surface consommée par habitant en 2014 est faible. Ainsi, alors que les grandes villes dédient de nombreux espaces aux activités économiques et aux services (centres commerciaux, établissements scolaires, hôpitaux…), un habitant des villes de plus de 40 000 habitants consomme en moyenne 257 m² de surfaces cadastrées, contre 1 159 m² pour un habitant d’une commune de moins de 2 000 habitants.

Les grandes villes consacrent 74 m² de surfaces cadastrées supplémentaires à l’accueil d’un nouvel habitant. A l’opposé, les communes de moins de 2 000 habitants, affectent plus de 5 000 m² supplémentaires hors routes à l’accueil d’un nouvel habitant. Ces communes de petites tailles représentent 66 % des communes de la région. La population étant faible l’impact d’un hectare consommé est d’autant plus important.

5 - La capacité à poursuivre le modèle de développement est réinterrogée


Quel développement en tenant compte des objectifs de réduction de la consommation d’espace ?

D’ici 2030, en se référant à la loi climat et résilience, les Pays de la Loire devraient consommer au plus 10 000 hectares, soit deux fois moins que durant la période 2011/2020. Toujours dans l’hypothèse d’une répartition uniforme entre départements, ces nouvelles surfaces seraient consommées par la Loire-Atlantique (2 664 hectares), suivie de la Vendée (2 447 hectares), le Maine-et-Loire (1786 hectares), la Sarthe (1 696 hectares) et enfin la Mayenne (1 411 hectares). Ce calcul est cependant théorique et dépendra des choix de déclinaison des objectifs de réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers entre les différentes parties du territoire dans le SRADDET et de leur déclinaison dans les documents d’urbanisme.


Les projections de population Omphale réalisées jusqu’en 2050 par l’Insee sont particulièrement favorables aux Pays de la Loire. Si ces nouveaux habitants consomment autant de surfaces cadastrées que ceux arrivés durant la période 2011/2020, les objectifs de réduction de la consommation des espaces naturels et agricoles et le zéro artificialisation nette en 2050 ne pourraient être atteints. Ainsi, il faudrait artificialiser plus de 59 000 hectares supplémentaires d’ici 2050 pour accueillir les 700 000 ligériens attendus, soit 1,9 % du territoire cadastré de la région. Un modèle actuel qui, s’il se poursuivait, ne pourrait répondre à la trajectoire vers le ZAN.

6 - Sources de données et références juridiques


Plusieurs sources ont été utilisées pour cette publication : les fichiers fonciers, l’occupation des sols à grande échelle (OCSGE), Teruti-Lucas et le recensement de la population.

Les fichiers fonciers

Les fichiers fonciers sont un retraitement par le Cerema des mises à jour des informations cadastrales (dites Majic) par la direction générale des finances publiques (DGFip).

Les fichiers fonciers ne disposent pas, en propre, d’une donnée sur la consommation d’espace. Un traitement spécifique de la donnée brute est donc nécessaire pour produire les données de consommation d’espace.

Le rapport détaille la méthode employée en quatre étapes est disponible sur le site de l’observatoire national.

Les fichiers fonciers ne portent que sur les parcelles cadastrées. Ainsi, ils ne permettent pas, sinon par différentiel, d’estimer l’état et les évolutions des surfaces non cadastrées (les étangs, les rivières, les espaces publics et les routes notamment).

Afin de comparer ces fichiers aux données du recensement, tout en tenant compte du délai de latence des premiers, deux années de décalage ont été appliquées entre les sources.

Des données de flux de consommation d’espace disponibles sur le site de l’observatoire national de l’artificialisation

L’action 7 du plan biodiversité du 4 juillet 2018 prévoit la mise en place d’un portail national de la consommation d’espace qui fournit régulièrement les chiffres de consommation d’espace enregistrés depuis 2009.

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite loi climat et résilience) définit la consommation d’espace comme la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés sur le territoire concerné. Le portail national en fournit annuellement les surfaces.

Des données de stock de surfaces consommées.

Dans les fichiers fonciers, chaque parcelle est composée d’une ou plusieurs subdivisions fiscales (Suf). Pour chaque subdivision fiscale, les fichiers fiscaux précisent un « groupe de nature de culture ». Il existe 13 groupes de nature de culture :

  • quatre sont de nature agricole (terres, prés, vergers, vignes).
  • deux ont plutôt les caractéristiques des espaces naturels et forestiers (bois, landes).
  • un correspond à de l’eau (uniquement l’eau cadastrée).
  • les six autres sont considérés comme des espaces artificialisés (carrières, jardins, etc.)

La somme de ces six dernières subdivisions fournit un stock annuel de consommation des espaces, utilisé pour le calcul de certains indicateurs de cette publication.

L’occupation du sol à grande échelle (OCSGE)

L’occupation du sol à grande échelle (OCSGE) est issue de l’analyse de photos aériennes. Elle constitue une source détaillée et facilement appropriable par le public grâce aux photos vues du ciel. Sa nomenclature peut être détaillée selon les spécificités locales. Elle est cependant longue à produire compte tenue de la phase de photo-interprétation, le millésime 2016 n’a pu être produit qu’en 2019. Jusqu’à maintenant, cette source étant commanditée par des organismes locaux, elle dispose d’un faible historique, en Pays de la Loire uniquement celui de 2013. Pour effectuer des calculs, une nomenclature, établie au préalable, est indispensable pour croiser deux couches d’information, l’une sur la couverture, l’autre sur les usages.

Teruti-Lucas

Teruti-Lucas (UTIlisation du TERitoire) est une enquête annuelle réalisée par les services statistiques du ministère en charge de l’agriculture ayant pour objectif de suivre l’évolution de l’occupation et de l’usage des sols sur tout le territoire national. Elle consiste à observer un ensemble de points représentatifs, puis extrapoler statistiquement les résultats à l’échelle départementale, régionale et nationale. Cette source utilise cependant une méthode par échantillon qui a tendance à majorer le phénomène d’artificialisation. Sa méthodologie a été récemment revue pour suivre l’artificialisation avec davantage de précisions. Elle dispose d’un historique intéressant puisqu’elle est disponible depuis 1982. Trois séries historiques sont ainsi disponibles : 1982-1990, 1992-2003 et 2006-2015. L’autre intérêt de ces données est sa couverture nationale, qui nous permet de replacer la place de la région par rapport aux autres en 2018 et de voir pour chaque département la part consacrée à la voirie ou non.

Le recensement de la population

Les chiffres démographiques utilisés sont issus du recensement de la population. La population prise en compte correspond à celle qui vit en permanence sur la commune c’est à dire à la population dite municipale. Ce choix a une incidence pour les communes, notamment littorales, dont une part non négligeable des surfaces artificialisées est, dans les faits, dédiée à une population y résidant temporairement. Elle ne comprend pas la population comptée à part qui correspond aux personnes dont la résidence habituelle est dans une autre commune mais qui ont conservé une résidence sur le territoire de la commune (étudiants, personnes en maisons de retraite, en casernes…).

Références juridiques

Les lois de décentralisation des 7 janvier et 22 juillet 1983 ont introduit l’objectif de gérer le sol de façon économe. La loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain, (appelée loi SRU) , la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement (loi Grenelle I), complétée par la loi no 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (loi Grenelle II), la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, (loi ALUR ou loi Duflot II) ainsi que la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (dite loi ELAN) de 2018 ont inscrit la lutte contre l’étalement urbain comme des objectifs généraux des politiques publiques et documents d’urbanisme. En 2021, la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite loi climat et résilience) fixe un objectif d’absence d’artificialisation nette d’ici 2050 complété d’un objectif intermédiaire de réduction du rythme de la consommation d’espace naturels, agricoles et forestiers (NAF) pour la décennie suivante.